lundi 26 avril 2010

A Nassogne - Le vingt et unième jour

Didier de Lannoy
A Nassogne
sous-titré Presque un mois chez Gougoui Kangni
roman,
avec des personnages réels, se passant en un lieu précis, à une époque déterminée
2005-2006
Extraits

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Le vingt et unième jour


Cinq heures, hop ! je me lève.

Il fait encore sombre et je ne vais pas pouvoir commencer à travailler tout de suite.

Je vois de la lumière dans la cuisine (une lampe torche) et je vais prendre une tasse de café. Avec Gougoui. Dont je ne sais pas s’il s’est déjà brossé les dents. Et qui ne sais pas non plus si j’ai lavé les miennes.

Donc, on se parle… Mais à petits mots… Limite, limite…

Le clavier de mon ordinateur fait-il moins, autant ou plus de bruit que le coq de Gougoui (lequel, pour l’instant, fanfaronne et cartonne vachement !) (à moins que ce ne soit le coq du vieux d’à côté ?). Qu’en pense la dame qui occupe la chambre voisine de la mienne ? Et que pense-t-elle des ronflements de mon appareil respiratoire ? Y a-t-il des bruits admis et des bruits interdits, dans un château, à la campagne, au Togo ?

Nouvelle journée, nouveau chapitre de mon roman. Va-t-il se passer quelque chose ? Ne devrais-je pas plutôt m’arrêter là où j’en suis ? Que va-t-il bien pouvoir arriver d’autre et de différent ? Cela vaut-il la peine d’ouvrir un nouvel épisode de cette chronique fastidieuse et d’attendre, attendre, attendre, attendre ? Les « aventures » », c’est comme les menuisiers, le mécanicien du groupe électrogène ou les « clients » (tiens, n’assiste-t-on pas au retour d’un mot que je m’étais interdit

- Mobudiééé !

- Mais dans le cas présent, petite chérie, c’est plus commode. Ça permet de ne pas devoir les énumérer tous : les « picoleurs », les « affamés », les « hôtes » et les « usagers ». Sans compter que ces gens-là passent allègrement, au courant d’une seule et même journée, d’une catégorie à l’autre

de prononcer !), on ne sait pas si elles viendront, ces aventures-là… Ni à quelle heure, ni à combien… Et elles se contenteront de boire et amèneront leur « manger »… Ou si elles commanderont les « mets cuisinés sur place »… Et si elles dormiront au gîte… Dans les chambres ou dans les bungalows…

Mais il faut toujours être prêt à les recevoir. Avoir du stock, de la bière au frigo, une page blanche à salir…

En attendant l’arrivée de ces aventures-là (peut-être faudrait-il que je me mette en chasse ?) (mais il est encore un peu tôt, non ?), je me pose des questions sur mes personnages « réels » et les évènements « de pure fiction » (tout se passe dans ma tête !) (je tiens à le répéter !) (je veux que les choses soient claires !)) dans lesquels ils se sont trouvés impliqués, bon gré mal gré, en des lieux que je n’ai pas vraiment inventés.

- Tu as des remords, douchka ? C’est en tant qu’ancien membre du Service juridique de la Régie des Bâtiments, que ça te travaille ?

Non. Pas vraiment. Mais je n’aime pas déranger, ce n’est rien d’autre que ça. Tout le monde mérite tout le bonheur du monde, quoi ! Et si quelque chose dérange quelqu’un, je préfère changer ce qui dérange. Et on peut toujours changer beaucoup de choses. C’est assez facile à faire (« find » puis « replace »). Changer les prénoms ou les noms propres, par exemple (débaptiser Gougoui et le prénommer Adof ou Crédo ou Salissou ou Abassa ou Amévi ou Mbabiniou ?) (débaptiser Yaovi et le prénommer Alain ?) (ils ont des points en commun, non ?) (ils transpirent tous les deux quand ils font la cuisine !) (ou faire en sorte que Kossi s’appelle désormais Jean-Darius ou Kolle et que Mawussi se nomme Ambavi ou Dela ou Afi ou Amélé ou Akouvi ou Ahéba ? ) ou les intervertir (attribuer à Jan De Cort le nom d’Henri Jouant ?) (et vice-versa ?).(ou marier Jan à Nuray et Isabelle à Henri). Ou changer les noms des lieux (situer Nassogne sur la route de Kasangulu, du côté de la ferme de Nzeza ou sur la route de Kikwit, à la hauteur du plateau des Bateke et des champs de Cricri ?) (transformer le Togo en Congo ?) (ou, carrément, transférer Ixelles-Matonge en République populaire de Chine ?) (ou à Belize-City, au bord de l’océan ?)

Je demanderai son avis à Gougoui . Plus tard. Quand je lui aurai vendu la mèche. Pas avant.

Je m’installe sous la paillote « salle à manger particulière ». Un paquet de cigarettes (Bond !) traîne sur la table. Gougoui doit être dans les environs ? Mais non, le paquet est vide et le briquet de Gougoui n’est pas posé juste à côté. De plus les chiens ne rôdent pas aux alentours.

Fo Bomboma (mâchonnant un bâtonnet de bois entre les dents) nettoie la voiture du patron. Kossi remet les belles chaises à leur place, sous la grande paillote. Kudjo aiguise son coupe-coupe (il y met moins de temps que Kossi, non ?).

- Mais où est Kafui, douchka ?

Kafui, comme d’habitude (sauf quand elle se fâche et qu’elle crie) (et qu’est-ce que ça gueule alors !) (surtout lorsque Gougoui est parti à Lomé) (et, quand elle crie, Kafui me fait parfois penser à Maman Marthe, la mère de Maman Alphonsine et de Maman Denise) (elle criiie, en geignant) est une ombre. Je finis par la découvrir dans le grand couloir, près des chambres, occupée à balayer, sans faire aucun bruit pour ne pas réveiller les « hôtes ». Elle ne chantonne pas. Elle ne se sent pas bien depuis trois jours. La diarrhée, les douleurs dans la nuque, les sueurs froides, les maux de tête…

- Le palu !

Yao-le-cuisinier allume un four. Il achève de travailler la pâte.

- Ça met combien de temps à cuire, un pain dans ce genre de four ?

- Vingt-cinq à trente minutes. Et à Nassogne (Belgique), il y avait aussi un four, on cuisait aussi le pain ?

Une cloche sonne. Pas loin d’ici. Le petit-déjeuner des chrétiens est servi.

- Déjà, douchka ?

- T’as vu l’heure qu’il est, petite chérie ? On se lève tôt ici !

Un lézard se cache sous le paillasson posé devant l’escalier qui mène au premier étage.

Dog, à l’extérieur (les chiens n’ont pas le droit d’entrer) (les lézards non plus mais, quelquefois, quand ils sont encore très petits, il arrivent à se glisser à l’intérieur) est toujours très actif. Il attrape des mouches

- Et Pit et Bull, douchka ?

- Je ne les ai pas vus. Sans doute sont-ils sont encore à la chaîne… Pit ressemble (un peu) à Ndumba Ière mais avec une dizaine d’années de philosophie en moins… Bull, on dirait une renarde qui, parfois, se laisse apprivoiser (et semble alors rechercher des caresses) mais qui reste toujours sur ses gardes… Ça devrait te plaire…

Je bois abondamment du café (noir) et je pisse abondamment de l’urine (jaune). Où est passée la couleur du café ? M’est-elle restée dans les affaires intérieures (l’estomac, la vésicule biliaire ou le gros intestin ?) ou circule-t-elle à l’intérieur de mes vaisseaux sanguins ou se concentre-t-elle dans mes bloms et se tient-elle prête à monter à l’assaut de mon gagaragassou ? Et si je pisse autant que je bois, je vais finir par me dessécher complètement, non ?

- Cela fait combien de jours que tu ne portes plus de slip, douchka ? J’espère que tu n’oublies pas de changer de pantalon wax tous les jours, quand même !

La dame qui occupe la chambre voisine de la mienne est allée prendre une douche. Mawussi est arrivée et vient me saluer. Un nuage de parfum flotte dans la chambre. Un nouvel ilang-ilang s’est mis à fleurir ?

Il me reste moins de dix jours (huit exactement, non ?) (ou neuf ?) avant mon retour sur terre. J’ai atteint le quota de pages que je m’étais fixé (cent pages) (en Word, Times New Roman, Font Size 12) (cent vingt maximum). A quoi bon poursuivre ?

- J’ai tenu le coup vingt-et-un jours, petite chérie (ou vingt) ! Six de plus (ou cinq) que Sauter-Sauter, non ?

Je vais sans doute arrêter ici mon roman.

- Tu appelles ça un roman, douchka ?

- Mais oui, petite chérie. Ce n’est pas un poème, ni une légende, ni une fable, ni un conte traditionnel, ni une épopée, ni un opéra, ni une harangue, ni une chronique ou un reportage (ça y ressemble mais il y a trop de « triche »), ni le texte d’une chanson, ni une pièce de théâtre, ni un recueil de proverbes, ni un traité de métaphysique (ou de pharmaceutique ou de mathématique) et donc, par défaut, il faut bien que je me résolve à appeler ça un roman, non ? Après tout, même avec des personnages bien réels, un « récit de pure fiction », c’est un roman, non ? Et puis, de toute manière, c’est moi qui décide …

- Mobudiééé !

-… du nom que je donne à ce que j’écris, non ?

- Ainsi donc, comme on mène les gens « en bâteau », tu auras, pendant vingt et un jours (ou vingt, ce n’est toujours pas clair), réussi à nous mener « en roman » ?

- C’est cela même, petite chérie. Tu as tout compris !

- Espèce de bandecon !

- Espèce de salope !

J’arrête. Aujourd’hui. Platement. Sans coup d’éclat. Comme une bite qui se dégonfle. Comme un gagaragassou qui n’arrive plus à se tenir droit tout seul. Comme une pièce de musique qui s’affaise et se déglingue et ne trouve pas ses dernières notes. Comme un groupe électrogène qui cesse de tourner parce qu’il n’y a plus d’essence dans le réservoir.

J’aurai suffisamment de choses à faire les derniers jours. Quelques courses pour Ana et Lianja (les deux commandeurs de trucs impossibles à ramener à Ixelles-Matonge !) qui n’auraient pas encore été faites par Gougoui ou par Ekoé. Quelques trucs à régler. La relecture de l’ensemble de mon manuscrit (à Ixelles-Matonge, je n’en aurai sans doute pas le temps…) (et beaucoup de mes personnages m’auront alors quitté…) (et ceux qui seront encore à mes côtés, Ana et les enfants, ne seront plus « les mêmes »…) (je veux dire qu’ils ne seront plus à la même place qu’avant…) (eux, sur terre… et moi, au paradis…) (tandis que d’autres paroissiens voudront sans doute rentrer dans le roman en se plaignant de ne pas y avoir été invités plus tôt…) (alors que, si j’avais eu un besoin pressant d’eux avant, ils ne se seraient probablement taillés…) (ouais, je crois qu’il vaut mieux que je boucle le tout ici avant !). Et, si c’est possible, je profiterai aussi des quelques jours qui me restent pour enfin remettre en ordre de mon carnet d’adresses Outlook, eh ! Il serait temps aussi que je me repose un peu. Je suis dans le même état que Pit après ses aventures dans les villages des environs. J’ai tout donné. Et maintenant, je dois reprendre des forces, non ?

De plus, bientôt, viendront les fêtes. Des réservations ont été prises (un groupe d’ « affamés » va venir tuer le mouton et le rôtir sur place pour la « Bonani ») (et plusieurs familles d’« hôtes » passeront ici les fêtes de « Nouwel » avec leurs enfants) (et avec trois « bonnes » aussi !) (ou sont-ce des « parentes pauvres » ?). Et Gougoui et Fo Bomboma et Yao-le-cuisinier et Kafui et Mawussi et Kudjo et Kossi et Yaovi et Kluvi ne sauront plus où donner de la tête (Désirée, Lisa, Chérita, Lena et Adjovi monteront-elles du Quilombo pour se porter à leur secours ?) (et verrai-je enfin ce célèbre Nestor, fidèle serviteur du dieu sodabi et cuisinier talentueux, dont Gougoui n’arrête pas de me parler ?).

Il ne faudrait quand même pas que je leur écrive dans les pattes !

- Mais, avant que tu ne raccroches définitivement, dis-moi douchka, la ferme Ayobele…

- Ayodele !

- Oui (autant !), elle existe toujours, cette ferme-là, douchka ? Tu ne m’en parles plus depuis quelques jours…

- Elle continue de fournir des œufs au gîte. A raison de deux fois deux plateaux par semaine. Les mercredis et les vendredis. C’est Fo Bomboma qui va les chercher. A vélo. Avec la glacière.

- Et les chauves-souris ?

- Plus jamais vues, petite chérie. Peut-être ont-elles voyagé.

La dame qui occupe la chambre voisine de la mienne est assise sur la chaise à bascule de la terrasse. Elle boit un verre de jus d’ananas (fait maison !) et grigote quelques biscuits…et continue de faire sa bêcheuse. Je lui demande si les coqs ne l’ont pas dérangée ce matin.

- Quels coqs ?

Je fais un tour jusqu’à l’enclos. Les chèvres ne sont pas encore sorties. Je ne vois pas le bébé. Où se cache-t-il ? La grand-mère est montée sur un vieux pneu et « surplombe » le reste de la basse-cour. Mais deux mamans poules, et même une cane, se sont installées juste au-dessus d’elle, sur un perchoir, et la toisent. Chaque espèce essaie de dominer (être plus grande que, plus haut placée que) les autres ? Ces animaux sont très humains.

- Et les pintades, douchka ?

- Toujours aussi résignées, petite chérie. Rien n’a changé. On en mangera une tout à l’heure. Grillée. Et ce sera la dernière « exquise » du roman (mais pas du séjour !) (de toute manière ce n’est pas en vingt et un jours (ou vingt) qu’on peut épuiser la carte gastronomique du Togo !). Tu m’aimes ?

- Et les canes ?

- Elles bougent du popotin, du popotin, du popotin.

La dame qui occupe la chambre voisine de la mienne se met à toussotter. Une fois. Deux fois. Avec discrétion. Y a-t-il quelque chose de particulier dans cette chambre ? Des fibres d’amiante dans les draps de lit, de l’arsenic sur les pales du ventilateur, du poil à gratter sous les oreillers ? Ou a-t-on trempé la moustiquaire dans un seau d’eau bénite ?

Ou ne serait-ce pas plutôt, comme le laissait entendre ma petite chérie, la fumée âcre des cigarettes Bond du type qui tape sur son ordinateur, comme un malade, pendant des heures et des heures, dans la chambre à côté ?

Trois fois. Quatre fois. Puis ça s’arrête. Je ne devrai pas me plaindre à la direction.

Les chiens tournent autour de la petite paillote. Gougoui doit se trouver là-bas.
J’ai une question à lui poser.

- La petite paillote, ta « paillote de contrôle », elle est aussi ouverte aux visiteurs, douchka ?

- Avant oui… Mais plus maintenant. Depuis qu’un jour… un couple…

Ils n’avaient pas voulu louer de chambre. Trop cher, disaient-ils. Alors ils ont squatté la petite paillote. Toute la journée. Ils y ont bu. Ils y ont mangé. Ils y ont même dormi. Et sans doute y ont-ils fait aussi la « chose ». Par terre. Au sus (presque) et au vu (presque) de tout le monde. Et, depuis lors, c’est fini.

La dame qui occupe la chambre voisine de la mienne s’en va finalement. Vers onze heures. Seulâbre. Alors que je suis en train de papoter avec Gougoui sous la petite paillote. Non, je ne me précipite pas dans ma chambre-bureau pour voir si elle n’est pas partie en emportant mon manuscrit.

- Tu dis ça, douchka, mais, comme je te connais, je parie que tu es quand même allé vérifier ! Par inadvertance…

Gougoui libère les chiens.

Onze heures vingt-trois. Comme tous les jours à la même heure, Kudjo va consulter l’horloge mise à la disposition du vieux Kluvi (et de tous les manants), sous le toit de la paillote-loge. Et comme tous les jours à la même heure l’horloge indique : onze heures vingt-trois. Le break de Kudjo, c’est de midi à quatorze heures trente. Kudjo aurait évidemment préféré que l’horloge indique, hic ! déjà midi.

Désirée, la gérante du Quilombo (celle qui a eu un enfant avec l’ancien CB) est assise, en amazone, sur la table de la paillote « cuisine en plein air » et mange rapidement quelque chose. Elle m’a ramené les T-shirts qu’Ekoé a achetés pour Djuna et pour Lianja. Après avoir fini de manger, elle va rejoindre Kafui, à l’entrée, près de la barrière. Pour papoter ou pour prier ?

Je décide

- Mobudiééé !

d’arrêter ici mon roman. Je décide que rien ne va plus se passer. Et que je peux enfin déposer ma tête. Ce voyage de retour à Kinshasa, que j’ai effectué hier, m’a complètement lessivé… Et cette masturbation ratée aussi… Tour cela était profondément lamentable… Tu m’aimes quand même ?

A présent je suis à nouveau libre et je me sens vraiment soulagé ! C’est fini ! Je n’ai plus la pression !

- Mais cette pression, douchka, c’est toi-même qui te l’étais mise, non ?

Et j’ai fait la sieste toute l’après-midi ! Jusqu’à dix-huit heures moins la quart !

J’ai même failli rater l’heure du deha.

Finies les diarrhées de Kafui (ça fait déjà trois jours !). Finies les aventures de Fo Bomboma, de Yao-le-cuisinier, de Mawussi, de Chérita, de Kudjo, de Kossi, de Yaovi et de Kluvi (et je ne te parlerai pas de Lena, la serveuse au Quilombo qui montera aussi, plus tard, pendant quelques jours, donner un coup de main à Nassogne) (et qui parle la guen et l’anglais mais pas le français et qui ne sait pas non plus très bien compter) (mais dont les handicaps pourraient bien tourner à son avantage et devenir des atouts) (ni de Nestor, le cuisinier d’appoint qui réside à Bagbe et auquel Gougoui fait appel en cas de grande affluence) (fidèle serviteur du dieu sodabi) (et aussi des autres petits dieux que sont le tchoukoutou, le deha et même la bière) (et qui nous préparera, à Gougoui et à moi, plusieurs excellents repas de Nouwel) (côtes à l’os avec champignons, rognons au vin, canard à l’orange, tarte aux ananas, etc) (dont, comme convenu, je ne dirai rien) (ces personnages-là sont arrivés trop tard… alors que le roman était déjà bouclé !).

Finis les problèmes des groupes électrogènes (c’est presque réparé). Fini le montage et les essais du nouveau moteur de la deuxième voiture (ça va bientôt rouler !).

Finis aussi les journaux de Lomé à dépouiller pour bobonne. Je me retiendrai donc de te raconter, petite chérie, telle que rapportée par Monia dans Nouvel Echo, l’histoire de Sylvie (la belle-mère) qui couche avec Eloge (le gendre) et se fait surprendre par Gloria (la propre fille de la belle-mère du gendre et la propre épouse du gendre de la belle-mère) qui venait à peine d’accoucher et aurait normalement dû se trouver dans une clinique du quartier avec le nouveau-né: «… Le cœur serré, elle s’est dirigée à pas feutrés vers leur chambre. La porte s’ouvrit sans difficulté sur deux corps entièrement nus et bien enlacés. Sylvie et Eloge se consommaient dans la grande insouciance. Le cri de douleur poussé par Gloria a fait que ces deux assoiffés se sont dessoudés. Toute honte bue, ils se ruèrent sur Gloria et se mirent à la tabasser… »

- Finis mes coups de téléphone aussi ?

- Mais non, petite chérie, surtout pas ! « A partir ya lelo »…

- Mobudiééé !

-…tu pourras m’appeler autaaaant que tu voudras ! « A l’aisément ! » (eh ! je ne devrai plus prendre note de tes instructions, vers quatre heures du matin, à la lumière du vieux portable de Vieux Stany… et réveiller ainsi Crédo Tetteh, eh !).

- Bandecon !

Finies les commandes (j’attends encore que Maître Benoît me livre quatre derniers pantalons wax) (et il m’en remettra même un cinquième, l’artiste ! comme cadeau !) (et j’espère toujours que Kafui arrivera à me trouver des zigitas) (mais je commence à désespérer) !

Et bientôt fini également l’atelier (promis à Gougoui ) et le salon (voué à Nicole)

- Je ne veux pas en entendre parler !

de musique.

Ana fourrage, furete et me « cherche ».

- Mais le deha, douchka, je parie que ce n’est pas encore fini, ça ? Il te reste sûrement encore beaucoup de palmiers à abattre, non ?

- Je ne sais pas, petite chérie. J’en bois de moins en moins ces derniers jours. Ça commence à m’écoeurer. J’ai des envies de vomir. Peut-être devrais-je arrêter le deha comme j’arrête mon roman. C’est comme ça que Kudjo a commencé sa crise, non ? Après avoir bu trop de deha ou de sodabi. Je risque d’y laisser ma catapulte ou mon gagaragassou, non ? Tu m’aimes ?

- Ton tire-bouchon, tu veux dire ?

- Salope !

- Azui !

Ce soir les chiens sont absolument déchaînés.

Demain, (je ne descends pas, je ne monte pas) je vais à Lomé (en jeans, petite chérie, les bloms bien emballées dans un slip noir, rassure-toi).

Ciao !